25 mars 2017

Qui consomme vraiment l’eau de la planète ?


Plus d’un cinquième de l’eau consommée sur la planète est englouti par des produits destinés à l’exportation. Et en important de la sorte des biens intensifs en eau, les pays développés augmentent les pressions sur des zones fragiles souvent dépourvues de politiques de conservation de cette ressource rare. Voilà les conclusions d’une étude, publiée lundi 13 février dans les Proceedings of the national academy of sciences, qui modélise les flux d’eau autour du globe et met en évidence les disparités dans son utilisation.

A partir d’indicateurs commerciaux, de données démographiques et de statistiques sur l’usage de l’eau, souterraine, de surface mais aussi de pluie et celle recyclée, l’équipe de recherche de l’université de Twente aux Pays-Bas a quantifié et cartographié l’empreinte mondiale sur l’eau à une échelle géographique très fine.

Résultat : entre 1996 et 2005, 9 087 milliards de mètres cubes d’eau ont été consommés chaque année à travers la planète. L’agriculture en a englouti 92 %, notamment du fait de l’irrigation intensive des céréales telles que le maïs, le blé ou le riz (27 % de l’utilisation d’eau douce), ainsi que de la production de viande (22 %) et de produits laitiers (7 %).

Les Etats-Unis, qui ne représentent que 5 % de la population mondiale, constituent le troisième consommateur d’eau douce (1 053 milliards de m3 par an), après les beaucoup plus peuplées Chine (1 207 milliards de m3) et Inde (1 182 milliards de m3). Ramenée par habitant, la consommation américaine d’eau s’élève à 2 842 m3 annuels, contre 1 089 m3 pour la Chine, 1 071 m3 en Inde et 1 385 m3 en moyenne mondiale, comme le montre la carte de la consommation d’eau de chaque pays, par an et par habitant :
 
Au-delà de la consommation directe d’eau, pour un usage domestique ou agricole, le cœur de la problématique tourne autour du concept d’eau virtuelle, c’est-à-dire de la quantité d’eau utilisée pour fabriquer un bien de consommation. Environ un cinquième de l’eau consommée dans le monde est ainsi de l’eau virtuelle, échangée entre les pays sous forme de produits agricoles ou industriels.

C’est notamment le cas des produits alimentaires. Un kilo de bœuf nécessite ainsi 15 500 litres d’eau, un kilo de porc, 4 900 litres, le poulet, 4 000 litres, le fromage, 4 900 litres et le riz, 3 000 litres. En les important, les pays consommateurs sous-traitent à la fois la production alimentaire mais aussi les risques environnementaux et économiques qui peuvent découler de la surexploitation de réserves limitées en eau.

Cette carte montre les importations nettes en eau virtuelle et la direction des flux les plus importants (supérieurs à 15 milliards de m3 par an), liés au commerce de produits agricoles et industriels, entre 1996 et 2005 :

 

Les pays les plus dépendants de ces ressources sont, comme on pouvait s’y attendre, les îles et les régions désertiques : Malte, qui dépend à 92 % de l’eau virtuelle, le Koweït (90 %), la Jordanie (86 %) et Israël (82 %). Mais certains des pays qui possèdent les plus vastes ressources en eau au monde importent aussi de larges quantités d’or bleu. Le champion de la consommation est les Etats-Unis, qui importe 234 milliards de m3 chaque année. Suivent le Japon, qui importe 127 milliards de m3, l’Allemagne (125), la Chine (121), l’Italie (101), le Mexique (92) et la France (78).

De l’autre côté de la balance, les pays qui exportent le plus d’eau virtuelle sont les Etats-Unis qui, avec 314 milliards de m3 par an compense plus que largement ses importations, la Chine (143 milliards de m3 par an), l’Inde (125) et le Brésil (112).

Au final, les auteurs de l’étude, Arjen Hoekstra et Mesfin Mekonnen, ne proposent pas de solutions directes pour limiter la consommation d’eau, virtuelle ou pas. Ils font surtout valoir que cartographier de manière précise l’empreinte eau de l’humanité permet aux Etats de connaître les risques de dépendances qu’ils encourent alors que la diminution des ressources devient une préoccupation internationale.

Audrey Garric
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