25 avril 2015

Comment les firmes US ont travaillé pour le Reich


Avant et pendant la Seconde Guerre mondiale, les industriels américains font mieux que s'accommoder du régime nazi. ITT et General Motors, par exemple, développent leurs affaires en Allemagne... quitte à produire, pour l'une, des bombardiers, pour l'autre, des camions militaires utilisés contre les armées alliées. Elles ne furent pas les seules.

Au milieu des années 1920, l'Allemagne est un pays vaincu, ruiné par l'inflation et par les faramineuses réparations dues aux Alliés. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, il faut 8 marks pour un dollar. Quatre ans plus tard, le change est divisé par cinq cent mille : un billet vert vaut 4 millions de marks ! Mais, au début des années 1930, le redressement économique du pays est spectaculaire. Les sociétés d'outre-Atlantique, fortes de leur monnaie, achètent, bon marché, des pans entiers de l'industrie allemande : Ford, General Motors, IBM, DuPont de Nemours, ITT, General Electric, etc. prennent des participations dans les entreprises d'outre-Rhin. La nature du régime politique leur importe peu, d'autant que certains capitalistes américains ne sont pas insensibles aux sirènes national-socialistes.

Ils sont d'ailleurs choyés par les nouvelles autorités allemandes : dans son numéro du 4 août 1933, le New York Times rapporte, dans un entrefilet, que le nouveau chancelier Hitler vient de recevoir une délégation d'hommes d'affaires américains à Berchtesgaden. Parmi les invités : Sosthenes Behn, PDG d'International Telephone and Telegraph (ITT) et son agent général pour l'Allemagne Henry Mann. Behn est venu demander au conseiller économique d'Hitler, Wilheim Keppler, de lui indiquer des hommes de confiance que les nazis accepteraient de voir siéger dans les conseils d'administration de sa vingtaine de filiales allemandes. Keppler suggère Kurt von Schroeder, de la Stein Bank, banquier d'Hitler et futur général SS. Schroeder entre au conseil d'administration de la SEG, la Standard Elektrizitäts Gesellschaft, propriété de la compagnie américaine. A lui de défendre au mieux les intérêts de la maison mère dans le Reich. Il réorganise la société, fait annuler ses dettes, et signe de nouveaux et substantiels contrats, dont certains touchent à la défense.

Autre agent d'influence recruté par l'industriel américain : Gehrardt Alois Westrick. Celui-ci, à la tête du cabinet juridique Albert & Westrick, représente déjà les intérêts d'entreprises américaines en Allemagne, notamment Kodak et Texaco.



© Inconnu

Hollywood a laissé une nation étrangère, l’Allemagne nazie, changer systématiquement pendant 8 ans ses films à propos de sujets très précis : tout ce qui touchait à l’expérience allemande pendant la première Guerre Mondiale et tout ce qui avait trait à la persécution des Juifs par Hitler.

L'entente entre ITT et le régime nazi est au beau fixe. Behn rencontre à plusieurs reprises Hermann Goering, chargé par Hitler de l'exécution du « plan de quatre ans » qui le place à la tête d'importants complexes industriels. En 1938, sa compagnie acquiert 28 % du capital de la FockeWulf, qui produit des bombardiers. La même année, au lendemain de l'Anschluss, Behn rencontre à nouveau le Führer. La compagnie autrichienne Czeija Nissi, dans laquelle il a des intérêts, vient de tomber sous le coup d'une mesure d'expropriation. Tous les juifs sont mis à la porte, y compris le président, Frank Nissi. Si l'Américain obtient des assurances quant à l'avenir d'ITT au sein du Reich, il se garde d'évoquer le sort des employés juifs. Mieux, après le début du conflit, en 1939, Kurt von Schroeder obtiendra du ministère de l'Économie que les filiales ITT bénéficient de la nationalité allemande, échappant aux mesures de séquestre qui frappent les biens étrangers.


 
Alors que les bruits de bottes se font entendre en Europe, les grandes firmes américaines, soit directement, soit par leurs filiales, gérées depuis des pays neutres, notamment la Suisse, arment le Reich. Ainsi General Motors. A Noël 1936, James Mooney, vice-président de la branche européenne, est à Berlin, pour discuter avec Hjalmar Schacht, ministre des Finances du Reich. Commentaire atterré de l'ambassadeur américain, William Dodd, cité, à l'époque, dans le New York Times :
« Une clique d'industriels américains est diablement attirée par la création d'un État fasciste qui supplanterait notre démocratie et qui travaillerait étroitement avec les régimes fascistes en Allemagne et en Italie. » Le diplomate reprend aussi les propos tenus par un « important dirigeant de l'un de nos plus grands organismes financiers » prêt à installer le fascisme en Amérique « si le président Roosevelt continue sa politique progressiste notamment en matière sociale ».

Ce qui n'alarme pas outre mesure Mooney qui, basé en Angleterre, multiplie, tout au long du mois d'avril 1939, les allers et retours entre Londres et Berlin où il rencontre tout ce que l'Allemagne nazie compte de personnages importants. Mooney est un ami du Reich. En 1938, il a été décoré par Hitler en personne (comme le président d'IBM Thomas Watson ou l'aviateur Charles Lindbergh) de l'ordre allemand de l'Aigle , une distinction réservée aux étrangers. Il est aussi le plus gros investisseur du German American Trade Board, la Chambre de commerce américano-germanique, un organisme dirigé par un banquier... allemand, August Theodore Gaussebeck, président de la Robert Mayer Inc. Son établissement d'affaires est le correspondant aux États-Unis de Kurt von Schroeder, via la banque du frère de ce dernier, Henry Schroder - qui a américanisé son nom.

Malgré la paix dans l'honneur souhaitée par les diplomates à Munich, c'est la guerre dans le déshonneur, qui survient après l'invasion de la Pologne. Le 3 septembre 1939, la Grande-Bretagne et la France entrent dans le conflit. Si cela n'empêche pas les affaires, ça peut les contrarier. Aussi, à la demande de Ribbentrop, ministre des Affaires étrangères du Reich, Gehrardt Alois Westrick, l'intermédiaire des entreprises américaines, se rend aux Etats-Unis au printemps 1940 pour rencontrer des industriels, parmi lesquels Ford. Il est rien moins chargé que d'obtenir des Américains qu'ils coupent les vivres aux Anglais.

C'est la Robert Mayer Inc. de Gaussebeck qui prépare le voyage, financé par Sosthenes Behn et par James Mooney. Le 26 juin 1940, tout ce beau monde se retrouve pour un dîner de gala au Waldorf Astoria de New York : au menu, la célébration de la victoire allemande sur la France. Parmi les hôtes : Mooney, Ford, mais aussi Torkield Rieber de Texas Company, Ralph Beaver Strassburger, un millionnaire de Pennsylvanie, propriétaire foncier en Allemagne et en France, les directeurs de Kodak, Underwood, etc.

Le New York Herald Tribune révèle l'affaire. Westrick doit quitter précipitamment les États-Unis. Quant à Gaussebeck, protégé par un statut de « diplomate bolivien », il ne sera expulsé vers l'Amérique du Sud qu'en 1942. De là, il rejoindra Berlin puis Monaco où il montera une banque et un réseau financier destinés au commerce entre les USA et le Reich, via des pays neutres.

Petits ou grands, les milieux d'affaires américains se précipitent sur le marché allemand. Si c'est souvent pour faire des affaires, il arrive aussi que ce soit par pure adhésion à l'idéologie nazie. « La paix mondiale par le commerce mondial » ( World peace through world trade )... avait lancé Thomas Watson d'IBM, lors de son élection à la tête de la Chambre de commerce international, en 1933. Ce slogan est devenu « la guerre mondiale par le commerce mondial ». Au total, pendant le conflit, près de 8 milliards de dollars seront investis en Allemagne nazie par les firmes américaines.

Les Etats-Unis ne sont pas encore en guerre et leur coeur balance en faveur de leurs alliés européens traditionnels, au premier rang desquels l'Angleterre, malgré le souhait de Ribbentrop et les tentatives de Westrick. Le FBI est chargé de lutter contre l'infiltration des pronazis dans l'industrie et la finance. Le 3 mai 1941, son directeur, J. Edgar Hoover, rédige un mémo destiné au président Roosevelt :
« J'ai reçu une information à mon bureau d'une source socialement éminente et connue pour être en contact avec quelques-uns des personnages impliqués [...] selon laquelle Joseph P. Kennedy, l'ancien ambassadeur en Angleterre, et Ben Smith, l'opérateur de Wall Street, quelque part dans le passé, ont eu une réunion avec Goering à Vichy, France et, par la suite, Kennedy et Smith ont versé une somme d'argent considérable pour la cause allemande. Ils sont tous deux décrits comme très antibritanniques et proallemands... » Cette note est à la fois terriblement imprécise et accusatrice. Ben Smith est un ami intime de Kennedy, qui a été ambassadeur à Londres, où il a fréquenté le clan de Clivedden, un groupe d'aristocrates et d'industriels anglais ouvertement pronazis. Avec lui, il s'est enrichi à la Bourse dans les années 1930. Il est aussi connu des Renseignements généraux à Paris. Il est à la tête de plusieurs affaires, notamment des mines d'or au Canada, de la société de caoutchouc General Tire à New York et de la banque Thompson et Mackinoon. Il est aussi l'un des personnages les plus influents du New York Stock Exchange, la Bourse américaine. En Europe, il acquiert des brevets pouvant être exploités aux États-Unis. Une note de l'ambassadeur de France à Washington, de novembre 1939, signalait que Smith avait attiré l'attention de lord Forbes, attaché de l'Air de Grande-Bretagne à Bucarest. Il tentait de vendre de l'aluminium à l'Allemagne par l'entremise de la Roumanie.

Le 7 décembre 1941, l'attaque japonaise contre Pearl Harbor, à Hawaï, change la donne. L'Amérique entre en guerre et la proclamation du Trading with Ennemy Act, interdit le commerce avec l'Allemagne. ITT se découvre alors la fibre patriotique. Le groupe place ses hommes à tous les échelons de l'appareil militaro-industriel américain. En septembre 1942, Behn annonce ainsi la construction d'une usine dans le New Jersey. ITT, avec l'aide d'ingénieurs français réfugiés outre-Atlantique, y met au point des inventions comme la radiogoniométrie haute fréquence, surnommée « Huff-Duff » qui servira à repérer les sous-marins allemands. Ainsi, tandis que les avions FockeWulf lâchent leurs bombes sur les navires alliés, et que les câbles d'ITT transmettent des renseignements aux U-Boote, les appareils de repérage d'ITT-USA protègent les bâtiments alliés des torpilles ennemies.

Autre ville d'Europe où se joue la destinée de l'Europe en guerre : Berne. En Suisse, les Etats-Unis disposent d'une ambassade dont un des diplomates cumule plusieurs casquettes. Allen Dulles est alors à la tête du bureau de l'OSS - future CIA dont il deviendra après-guerre directeur. Il est aussi avocat d'affaires. Avec son frère, John Foster Dulles, (secrétaire d'Etat américain dans les années 1950), il dirige le cabinet Cromwell & Sullivan qui représente les intérêts de firmes américaines, telles l'Allied Chemical Company ou la General Aniline & Film Corporation, toutes deux ayant des liens avec le conglomérat allemand IG Farben. Cromwell & Sullivan est en relation d'affaires directe avec le cabinet allemand Albert & Westrick, celui-là même qui défend les intérêts d'ITT.

Dulles a pour mission d'espionner les nazis. Et qui choisit-il pour s'entourer ? Exclusivement des fils des grandes familles industrielles américaines, ayant toutes des relations d'affaires privilégiées avec le régime nazi ! Paul Mellon, fils d'Andrew du trust de l'aluminium Alcoa ; Junius et Henry Morgan de la banque du même nom ; Alfred DuPont (DuPont de Nemours), William Van Allen (famille Astor). A Zurich, Dulles place également un vice-consul, très actif, ancien directeur de la banque Schroder de New York. Un pied dans l'espionnage, un autre dans les affaires, Allen Dulles va tenter de monter une paix séparée avec les milieux allemands conservateurs et les industriels antinazis notamment par l'intermédiaire du comte Moltke, parent de Kurt von Schroeder. Il sera aidé par Walter Schellenberg, chef des services de renseignement de la... SS. Un personnage dont le FBI affirme qu'il était en mission aux Etats-Unis à la fin des années 1930, chez... Gaussebeck !

De leur côté, les directeurs de General Motors veillent sur leurs intérêts. Malgré les excellentes relations entretenues par Mooney avec le Reich, le 25 novembre 1942, le gouvernement nazi nomme le Pr Carl Luer administrateur du complexe Opel à Rüsselsheim, filiale qui risque ainsi de leur échapper. Mais la cour d'appel provinciale de Darmstadt précise que « l'autorité du conseil des directeurs ne sera pas affectée par cette décision administrative. Les méthodes et les responsables du management resteront les mêmes ». De fait, les patrons de GM continueront de siéger au conseil d'administration d'Opel durant toute la guerre.

Mieux, en violation du Trading with Ennemy Act, les informations, rapports, transferts de matériel circulent parfaitement entre le siège de Detroit, les filiales installées dans les pays alliés et celles implantées dans les territoires contrôlés par l'Axe. Les registres d'Opel révéleront que, de 1942 à 1945, la firme élaborera sa stratégie industrielle en coordination étroite avec ses usines éparpillées dans le monde, notamment avec GM Japan, GM Continental (Anvers), GM China, GM Uruguay et GM Brésil. En 1943, alors que la firme équipe l'aviation américaine, sa filiale Opel produit les moteurs du Messerschmitt 262, le premier chasseur à réaction au monde. Capable de voler à près de 1 000 km/h, cet appareil surclasse le P-510 Mustang américain.

Paris, le 25 août 1944. Le jour de la Libération, les employés d'ITT en France célèbrent l'événement dans les laboratoires de l'usine après avoir hissé le drapeau tricolore. Une Jeep s'arrête devant la porte. Et qui voit-on, assis au côté de son fils William au volant : le colonel Sosthenes Behn en personne, vêtu d'un battle-dress maculé de boue ! Officiellement spécialiste des transmissions auprès de l'US Army, le boss américain effectue une tournée d'inspection de ses usines en Europe. Il se rend à Anvers, à Bruxelles, revient à Paris. Dans son édition du 20 septembre, le Daily Mail raconte comment une poignée de businessmen américains - dont l'un s'occupe de « matériel électrique » - a atterri à Londres. Le secrétaire d'État américain, Cordell Hull, croit bon de démentir la nouvelle.

Behn n'est pas le seul cadre d'ITT à accompagner l'armée américaine. Certains directeurs de la firme arborent même des étoiles de général sur leurs uniformes. L'un d'entre eux a été président du conseil des filiales européennes et a siégé aux côtés de l'Allemand Westrick. De quoi indigner le député américain Jerry Voorhis qui fustige devant le Congrès « une grande compagnie internationale qui possède en Allemagne des avoirs et des intérêts dont on connaît parfaitement la nature, et dont le vice-président est investi du pouvoir de décider des mesures à prendre pour empêcher l'Allemagne de reconstituer ses forces d'agression »... Ce que ce dernier fait à sa manière. En octobre 1945, ITT parvient à démanteler deux usines aéronautiques, situées à Mühlhausen (Thuringe) en secteur soviétique, pour les remonter à Nuremberg, dans la zone américaine. Avec l'appui de l'incontournable Westrick.

Que cache cette métamorphose qui fait d'un Behn, ancien supporter d'Hitler, un héros de la cause alliée ? De toute évidence, le colonel Behn s'est mis à collaborer avec les services secrets américains. Avec Allen Dulles dans le rôle de l'intermédiaire qui permet à ITT, avec l'appui de l'armée américaine, de se réinstaller en Europe et d'assurer la protection de son associé Westrick. Ce qui ne manque pas d'en alarmer certains aux États-Unis.

Ainsi, en 1946, au nom de l'Attorney General, le ministre de la Justice, Tom Clark, et de son chef du service antitrust, Wendell Burge, une plainte est instruite contre ITT. L'acte d'accusation précise notamment que pendant la durée de la guerre des liens « furent [...] maintenus [...] entre le système des compagnies ITT et les associés contractuels de l'ISEC [International Standard Electric Company, filiale européenne d'ITT], travaillant chez l'ennemi ou en territoire occupé par l'ennemi ; et cela sous la haute direction d'un nommé Gehrardt A. Westrick. Ce dernier avait été chargé par Sosthenes Behn, président de la société défenderesse, et pour la durée de ladite période de guerre, de la gestion de l'ensemble des filiales ITT implantées dans différents secteurs de l'Europe continentale ; Westrick était en outre muni des pleins pouvoirs pour représenter les intérêts du système ITT en Allemagne. »

Au cours de l'interrogatoire qu'il subit après la guerre, le banquier allemand Kurt von Schroeder affirma que Behn avait approuvé l'achat des actions FockeWulf. Il ajouta :
« De 1933 jusqu'à la déclaration de guerre, le colonel Behn aurait pu transférer aux États-Unis la plus grosse partie des bénéfices réalisés par les filiales allemandes d'ITT, mais jamais il ne me demanda de l'aider à le faire. Bien au contraire, il paraissait très content de réinvestir tous les bénéfices des sociétés dont il avait le contrôle en Allemagne dans de nouveaux bâtiments, de nouveaux équipements ainsi que dans d'autres entreprises d'armement. » On lui demanda : « Avez-vous eu connaissance directement ou par ouï-dire d'une quelconque contestation de la part du colonel Behn ou de ses représentants à l'égard des entreprises de son groupe qui participaient au réarmement de l'Allemagne en vue de la guerre ? » Réponse : « Non. »

Le dossier ITT sera classé sans suite. Mieux. En 1967, ITT obtient 27 millions de dollars du gouvernement américain au titre des dommages subis par ses usines d'Allemagne, y compris 5 millions de dollars pour les dommages causés aux usines FockeWulf, sous prétexte qu'elles constituaient des « propriétés américaines en partie détruites par des bombardiers alliés ». La même année, GM obtient 33 millions de dollars sous forme d'exemption fiscale sur ses bénéfices pour « les gênes et les destructions occasionnées à ses usines fabriquant des avions et des véhicules motorisés implantés en Allemagne, Autriche, Pologne et Chine ». De son côté, Ford arrache un peu moins d'un million de dollars pour les dégâts provoqués à ses chaînes de fabrication de camions militaires installées à Cologne. Sans compter les 38 millions de francs versés, pendant la guerre, par Vichy, après le bombardement par des avions alliés de son usine de Poissy, dans laquelle elle produisait vingt camions par jour destinés à la Wehrmacht.
En 1947, James Stewart Martin, chef de l'Economic Warfare Section du ministère de la Justice, démissionnait en précisant : « En Allemagne, ce ne sont pas les hommes d'affaires allemands qui nous ont tenus en échec. [...] Nous avons été bloqués en Allemagne par les hommes d'affaires américains. [... ]. »
 
Ford

Henry Ford, le plus que septuagénaire milliardaire américain, est un antisémite maladif. Il accuse les juifs d'avoir déclenché la Grande Guerre et commence à les attaquer dès 1916. En 1920, il achète un hebdomadaire, le Dearborn Independant , qui lui fournit une tribune contre les « banquiers cupides de Wall Street » et « la juiverie internationale, un des problèmes du monde ». En 1938, Ford Company ouvrira, dans la banlieue de Berlin une usine d'assemblage de véhicules transports de troupes. Avec Opel, société d'origine allemande, mais propriété de General Motors, l'autre grand constructeur automobile US, Ford produira près de 90 % des half-tracks de 3 tonnes et 70 % des camions de lourd et moyen tonnages utilisés par la Wehrmacht.

Des alliés objectifs de l'effort de guerre... allemand

Sosthenes Behn, le président d'ITT, termine la guerre avec le grade de colonel de l'US Army. Durant le conflit, la FockeWulf, dans laquelle il a des participations, produit des bombardiers. Idem pour James Mooney, dont les usines Opel de Rüsselheim, appartenant à la GM, fabriquent des camions pour la Wehrmacht.

Les sombres calculs d'IBM

Le patron emblématique d'IBM s'appelle Thomas Watson. En 1937, dans une lettre destinée à Hjalmar Schacht, le ministre des Finances du Reich, il se félicite de ses relations avec l'Allemagne depuis la fin de la Première Guerre mondiale et ajoute que le monde devrait accorder « une compréhension sympathique au peuple allemand et à ses objectifs sous la conduite d'Adolf Hitler ». Le fond de commerce de Watson, c'est l'exploitation du procédé Hollerith de machine à calculer. Dès 1924, IBM se rend acquéreur d'une société allemande, Dehomag. Au cours des dix années qui suivent, Watson gère personnellement l'activité de sa filiale et, surtout, tire profit des améliorations apportées par des ingénieurs allemands. A elle seule, la Dehomag réalise plus de la moitié du chiffre d'affaires des soixante-dix filiales de la marque. Quelques semaines seulement après la prise de pouvoir par Hitler, IBM investit plus de 7 millions de Reichsmarks - plus d'un million de dollars - pour le développement de la Dehomag. IBM contrôle alors près de 90 % du marché mondial des machines à cartes perforées. La bureaucratie allemande, friande de statistiques, va en tirer parti. Dehomag va prêter son concours au « tri » entre les juifs et les non-juifs dans le Reich. Dans la revue de l'Association statistique allemande, à laquelle collaborent des cadres de la Dehomag, on peut lire : « Nous nous attaquons actuellement à de nombreux problèmes de première importance, des problèmes de nature idéologique. L'un de ces problèmes est celui de la politique raciale, et il a grand besoin d'un éclairage statistique. » Avant l'entrée en guerre des Etats-Unis, la firme avait quand même senti le vent tourner. En mars 1941, elle avait créé, aux Etats-Unis, la Munitions Manufacturing Corporation qui fabriquera des canons de 20 mm, des fusils automatiques, des appareils de visées pour la DCA, des masques à gaz... Ce qui ne l'empêchera pas, dans le même temps, par le biais de son holding suisse, de continuer à percevoir les bénéfices de ses usines allemandes !

Standard Oil fait tache

Les compagnies pétrolières étrangères, indispensables à l'effort de guerre allemand, apportent leur concours au régime nazi. En 1934, Standard Oil l'américaine, Shell la hollandaise et BP la britannique forment un cartel. Le patron de Standard Oil, Walter Teagle, n'est pas pronazi comme Henri Deterding de la Shell (à sa mort en 1939 en Allemagne, ce dernier a droit à une garde d'honneur SS). Il est convaincu que les multinationales sont détachées des contingences du monde. Standard Oil va fournir aux Allemands les brevets du tétra-éthyle de plomb entrant dans la fabrication de l'essence d'avion. En échange de quoi, Standard Oil, désireuse de se lancer dans la fabrication du caoutchouc synthétique, se tourne vers IG Farben, cependant qu'elle freine les recherches américaines dans ce domaine. En 1941, une commission d'enquête parlementaire dirigée par le futur président Truman attaque Standard Oil pour ses liens avec les nazis. La première audition terminée, un journaliste demande à Truman si, selon lui, les conventions entre Standard Oil et IG Farben relèvent de la trahison : « Oui, bien sûr, que voulez-vous que ce soit ? »

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